Se glisser dans les traits tourmentés d’Ophélie

Actualités lyriques

Par Communications et marketing

11 novembre 2024

Texte : Véronique Gauthier

Deux ans après son passage comme jeune artiste à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, Sarah Dufresne est de retour à Montréal pour la production de Hamlet de Thomas Ambroise, mise en scène par Alain Gauthier et dirigée par Jacques Lacombe. Son défi est de taille : interpréter le personnage exigeant d’Ophélie dans la tragédie inspirée de la pièce de Shakespeare. Un défi double, puisqu’il est à la fois vocal et théâtral.

Un premier contrat qui met la barre haute

Si la soprano signe ici son premier contrat en tant qu’artiste indépendante, elle n’en est pas pour autant à ses premières armes. Après son passage à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, sa voix claire et agile l’a menée de l’autre côté de l’océan, où elle a intégré pendant deux ans le programme pour jeunes artistes du Royal Opera House. Elle y a foulé les planches dans une dizaine de productions.

«Comme j’étais à l’Atelier pendant la pandémie, on a fait assez peu de productions. En Angleterre, j’ai pu travailler à la fois le côté scénique et vocal, et j’ai découvert un peu plus l’artiste que j’étais», explique-t-elle.

Pour un premier contrat dans les ligues majeures, on peut dire que défendre le rôle d’Ophélie en est tout un! «C’était définitivement dans la liste de rôles que je rêvais de chanter un jour. Mais je ne m’attendais pas à ce que ça arrive si tôt dans ma carrière! C’est une chance incroyable. C’est un rôle intimidant avec une partition intimidante, qui vient avec son lot de responsabilités. »

Les tourments d’Ophélie

Le répertoire lyrique regorge de personnages plus grands que nature, campés dans la mythologie, les légendes, les fables ou la comédie de situation. Dessinés à gros traits, ils illustrent ou alimentent souvent un angle précis du récit. Avec ces rôles, Sarah dit développer dans son travail de préparation une relation «d’humain à personnage. Leurs réactions dépassent le comportement réaliste qu’on observe dans la vie de tous les jours.» Mais avec Ophélie, son approche est véritablement d’humain à humain.

Le destin du personnage, qui sombre dans la folie et va jusqu’à précipiter sa mort, est bien connu du grand public. Interpréter des enjeux qui ont un poids aussi grand que ceux touchant à la santé mentale vient avec une grande responsabilité pour l’artiste. Sarah en a bien conscience et approche le tout avec la sensibilité qui s’impose. «Il y a tellement de gens qui ont vécu ou vivent avec des enjeux de santé mentale, ou encore qui ont côtoyé des gens qui se sont enlevés la vie. C’est un sujet très délicat.»

La soprano aborde son rôle avec la même empathie, le même amour et la même bienveillance qu’elle aurait face à une amie qui traverserait les mêmes épreuves. «Ophélie est très humaine, avec de réels sentiments auxquels chacun et chacune peut s’identifier. Elle est jeune et doit composer avec tellement de choses, plus que quiconque ne pourrait supporter! Elle porte le poids de plusieurs traumas à un âge où on n’a pas les outils pour les affronter. C’est un personnage complexe et je suis très enthousiaste de voir ce que je peux lui apporter.»

La scène de la folie illustre à la perfection la complexité du personnage et de ses enjeux. «Chaque fois que je la chante, je la termine les larmes aux yeux. J’ai l’impression d’avoir traversé tout le parcours émotionnel d’Ophélie, avec de multiples aller-retour entre différents états d’esprit. Elle doute de ses sentiments, de ce qui est vrai ou de ce qui ne l’est pas.»

Du drame et de la beauté

Fidèle à la plus pure tradition des tragédies, on peut dire que, dans Hamlet, personne ne connaît de fin heureuse. Dans un effet boule de neige, la société se détruit elle-même de l’intérieur, la famille royale aussi, tout va toujours de mal en pis. Mais à travers le drame s’immisce de la grande beauté. La beauté que l’on retrouve dans certains moments de l’histoire, d’abord, notamment dans des scènes entre la Reine et Ophélie. Mais surtout, de la beauté dans la musique.

«La scène de la mort est magnifique. À un certain moment, le chœur entame en humming une mélodie qu’Ophélie chante dans la scène de la folie, puis Ophélie reprend une partie du duo d’amour qu’elle interprète plus tôt dans l’histoire avec Hamlet. C’est ce qu’il y a de plus beau, comme si ça bouclait la boucle, avec la raison pour laquelle tout ceci est arrivé. Ça englobe toute sa courte vie. L’instrumentation est superbe et je crois bien que les gens vont pleurer! C’est très puissant et déchirant.»

La magnifique partition, trop peu présentée à l’opéra, représente également tout un défi pour la soprano. «Ophélie est un rôle reconnu pour être très difficile. D’abord parce qu’il est très émotif, mais aussi parce qu’il se tient très haut dans le registre. Ça demande beaucoup d’endurance et c’est un défi qui m’emballe beaucoup. Mon objectif est que ça ait l’air facile à chanter pour le public qui m’écoute, qu’on ne sente pas la difficulté de la partition.»

En assistant à une représentation de l’opéra Hamlet, le public peut donc s’attendre à être touché et à sortir empli d’une charge émotive partagée avec les autres spectateurs et spectatrices. Car si l’histoire n’est pas heureuse, l’expérience, elle, peut très certainement l’être!

Pour vous procurer des billets, c’est ici.

Blogue

>