Portrait : Sarah Dufresne, soprano

Mode de vie

Par

01 juin 2022

SARAH DUFRESNE, SOPRANO
ATELIER 2020-2022

Texte : Véronique Gauthier
Photos : Marianne Charland

Originaire de Niagara Falls, la soprano Sarah Dufresne s’installe à Montréal en 2017 pour compléter une maîtrise à l’École de musique Schulich de l’Université McGill. Diplôme en main, elle fait son entrée à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal en 2020. Rencontre avec une artiste sensible, terre-à-terre et passionnée par la voix.

À Montréal comme à la maison

Depuis sa tendre enfance, Sarah aime chanter. Des chœurs d’enfants à l’église jusqu’à ses études en chant lyrique à l’Université Wilfrid-Laurier à Waterloo en Ontario, sa route semble bien tracée. Mais a-t-elle toujours su qu’elle embrasserait une carrière professionnelle de musicienne? « Absolument pas! », répond-elle en riant. « Le déclic s’est produit lorsque j’avais environ 16 ans. C’est devenu clair que c’était ce que je voulais faire dans la vie. Mais comme je suis quelqu’un de très réaliste, je savais que ce ne serait pas facile, voire impossible. Je me trouve aujourd’hui très chanceuse, à 27 ans, de gagner ma vie en chantant! »

Lorsqu’elle s’installe à Montréal pour poursuivre ses études, Sarah s’y sent immédiatement chez elle. « C’est le premier endroit, après ma ville natale, où je me suis sentie à la maison. Pour moi, ce qui distingue Montréal, c’est le fait de pouvoir assister à un spectacle tous les weekends et avoir un festival où aller pratiquement tous les jours de l’été. Il se passe toujours quelque chose et j’adore ça! J’aime mon quartier, la montagne où je vais courir est tout près, je suis vraiment bien ici. »

L’Atelier lyrique: un milieu accueillant et chaleureux

Il était donc tout naturel pour la soprano de continuer à s’épanouir à Montréal une fois ses études terminées. Appelée à participer à la semaine des auditions nationales de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal tout juste avant l’arrivée de la COVID-19, elle y fait la connaissance des membres de l’équipe et il devient clair pour elle que c’est l’endroit où elle veut aller. « J’ai senti que ça cliquait avec tout le monde. J’avais aussi l’impression que l’Opéra de Montréal était une compagnie très accueillante, qui nous fait sentir comme à la maison, et c’était très important pour moi pour bien vivre ma transition entre la vie étudiante et la vie professionnelle. »

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Vivre de la musique pendant la pandémie

Ce cocon accueillant s’est avéré d’autant plus précieux que la période qui allait suivre s’annonçait houleuse. « Quand je regarde en arrière, je me considère vraiment chanceuse d’avoir auditionné à ce moment-là. J’ai trouvé ici une communauté et un support incroyable pour passer à travers la pandémie, tout en continuant à apprendre et à faire de la musique », souligne avec gratitude la jeune chanteuse.

Si la COVID-19 a forcé l’annulation de toute représentation scénique pendant plusieurs mois, la chanteuse voit ce temps d’arrêt au sein de l’Atelier lyrique comme une période lui permettant de se perfectionner et de passer beaucoup de temps à travailler sa technique. « Bien sûr, ce qui se passait était catastrophique, mais il y avait quelque chose d’agréable à pouvoir prendre des cours et des coachings tous les jours, étudier des rôles, travailler sur nous-mêmes. On a été les chanteurs les plus chanceux du monde au cours des deux dernières années, et on a continué à être payés pour chanter! »

La parfaite transition vers la vie professionnelle

Pour Sarah, l’Atelier représente le pont idéal entre la vie étudiante et la vie professionnelle, le parfait équilibre entre encadrement et autonomie. « On veille toujours sur moi, on veut que je réussisse, mais je dois aussi m’organiser et me débrouiller seule. À l’école, tu suis ton horaire et tu te laisses un peu porter par le courant, alors que dans la vie professionnelle, il faut avoir une longueur d’avance sur ce qui s’en vient. L’Atelier permet d’apprivoiser ça. »

Ses deux années passées à l’Atelier ont également permis à la soprano hypersensible de se connecter profondément avec l’artiste et la chanteuse qu’elle est. « Je suis une chanteuse complètement différente d’avant la pandémie », affirme-t-elle. « J’ai eu le temps et l’espace pour réfléchir et me demander “pourquoi est-ce que je chante?”. J’ai découvert que je chante parce que je ressens les choses très fortement, que je suis quelqu’un de très émotif, et je pense que j’ai une façon de m’exprimer à travers la musique qui rejoint les gens, qui permet de créer une véritable expérience entre le public et moi. J’ai réalisé pendant la pandémie que ma sensibilité était une force, et que c’était même une de mes plus grandes forces en tant qu’artiste. »

S’épanouir dans son unicité

La jeune femme a également pris confiance en elle grâce à l’Atelier qui l’a encouragée à s’exprimer et à s’affirmer. « C’est la première fois que je sentais que j’avais la permission d’être une artiste à part entière, que mes opinions étaient valables et que ce que j’avais à dire était intéressant. Ça m’a aidée à grandir! »

Plutôt que de former des chanteurs et des chanteuses à partir d’un moule, l’Atelier cherche à faire briller le meilleur en chacun d’eux. « L’équipe prend ce que tu es et t’encourage à aller plus loin. Ce qui compte, c’est la personne que tu es, toi. Ce que tu as à dire, toi. Je sens ça de la part de tout le monde avec qui je collabore ici. »

À commencer par Ariane Girard, sa professeure de chant auprès de qui elle s’est découvert une nouvelle richesse dans le timbre. Et Esther Gonthier, avec qui elle a pu boucler la boucle de son aventure montréalaise, puisque la pianiste coach l’a également accompagnée à son arrivée à l’Université McGill. « De travailler avec elle à nouveau, ça m’a permis de voir à quel point j’avais grandi, je suis tellement meilleure maintenant! Esther est une partie très importante de mon parcours musical à Montréal. »

Riders to the Sea: plongeon sur la grande scène

Un moment marquant dans son parcours à l’Atelier: l’opéra Riders to the Sea de Vaughan Williams, grâce auquel elle goûte pour la première à la grande scène du Théâtre Maisonneuve, à l’automne 2021. « C’était ma première production professionnelle, et j’étais impressionnée de faire partie de la même distribution qu’Allyson McHardy et Andrea Núñez. Je me disais “wow, je suis là, dans la même salle de répétition que ces deux femmes qui chantent partout”, et je savais ce que je faisais, et je savais que je pouvais bien le faire. Je devais simplement avoir confiance en moi. J’ai réalisé à ce moment-là que j’avais tout ce qu’il fallait pour faire ce métier. »

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Opéra, pop, crossover: chanter, peu importe le style

Si l’avenir professionnel de Sarah se destine à l’opéra, la chanteuse raffole des autres styles musicaux et ne se prive pas d’y goûter de temps à autre. « Pour moi, bien maîtriser mon instrument, ça ne veut pas seulement dire le maîtriser en opéra! Si on travaille bien sa voix, on peut chanter plein de choses. J’ai toujours trouvé important d’être capable de m’adapter à différents styles. »

Pour la jeune femme, chanter est d’abord un moyen d’exprimer des émotions. Ce qui peut se traduire autant par un air d’opéra qu’une composition pop au piano. « J’ai tout le temps besoin de chanter, mais ça peut prendre différentes formes. J’adore le fait que je peux chanter des contre-do, mais que je peux aussi interpréter une chanson douce et intime, et que les deux vont toucher les gens. Tout dépend de la couleur, de l’émotion qu’on y met. On peut tout faire! Alors, pourquoi ne pas le faire? »

Prochaine destination: le Royal Opera House

Dès la fin de l’été, le public européen aura la chance de découvrir le timbre onctueux de la soprano puisqu’elle s’envolera au Royaume-Uni pour intégrer le Jette Parker Young Artists Program au Royal Opera House.

« C’est un programme de deux ans, je ne sais pas ensuite ce qui se passera, si je resterai en Europe ou reviendrai à Montréal. Ce qui est certain, c’est que je resterai en contact avec l’Opéra de Montréal. Ça a tellement été deux belles années! J’y ai découvert des professeurs et des collègues extraordinaires. Je garderai toujours un lien particulier avec les gens ici et revenir à Montréal sera toujours un peu comme rentrer à la maison. »

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